
Sadibou a vu juste. Devant la porte du cyber situé sur la Rue 6 X 22, en face d’une institution de Microfinance, un jeune de grande corpulence, tout en sueur, vêtu d’un tee-shirt vert vient aux nouvelles. Comme s’il l’attendait, le gérant lui lance : « on n’a encore rien. Jusqu’à présent la connexion n’est pas venue ». Le regard hagard, le jeune homme tourne la tête de gauche à droite. « Je dois voyager. Mes partenaires m’avaient envoyé le billet par Internet, mais puisqu’il n’y a pas de connexion, je ne parviens même pas à le récupérer », se désole-t-il. Malgré la perturbation, le jeune homme n’a pas abdiqué. « J’ai tenté d’appeler pour qu’on me faxe le billet, mais les appels internationaux sont bloqués. C’est vraiment grave. Je risque de rater mon vol », confie-t-il. Une ultime solution s’offre à notre interlocuteur. « J’irai à l’aéroport. Comme les compagnies sont interconnectées, mon nom doit certainement être dans leur système. Peut-être, les responsables de ma compagnie accepteront de me laisser voyager », espère-t-il. Il n’est pas le seul obligé de trouver des stratagèmes pour voyager. « Une fille est venue ici ce matin. Elle doit imprimer un billet d’avion électronique, mais elle n’a pas pu récupérer ce sésame. Elle avait promis de prendre contact avec les responsables de la Sonatel pour ne pas rater son vol », renseigne Adama Sow, le gérant. Le jeune homme se désole aussi de voir de l’argent lui filer entre les mains. « Aujourd’hui, mes recettes sont nulles. Je n’ai rien encaissé. Pendant les périodes normales, je gagne entre 6 000 et 7 000 Fcfa », s’indigne-t-il. Avant que le jeune Adama Sow ne termine sa phrase, un homme, la cinquantaine sonnée, se pointe. « Je veux une heure de connexion », dit-il. L’air toujours désolé, le gérant lui fait remarquer que « la Sontalel est en grève ». « C’est inadmissible. Sans la communication, beaucoup de perturbations seront notées. Ce n’est pas bon pour le pays », confie-t-il. Un constat qu’il partage avec nombre de Sénégalais.
Babacar Dione et Seydou Ka
Source : Le Soleil, 6 août 2010